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Les à-valoir, appelés aussi “avance sur droits” peuvent être une notion compliquée à comprendre. Et pour cause, on n’en parle pas spécialement. Comme si c’était sale, ou puni par la loi? Quoi qu’il en soit, on préfère garder un peu de mystère. “On”? Les grandes instances, oui. Parce que du côté des autrices, on aimerait bien être mieux informées… Il s’agit quand même de nos revenus, en tout cas de la base de nos revenus. De cette somme qu’on est assurées de toucher pour l’écriture de nos romances. Et pourtant, la signification des à-valoir et leur fonctionnement ne sont pas si connus que ça…

Fausse croyance sur les à-valoir

 

Quand j’en avais encore le temps, je faisais du coaching personnel pour autrices de romances. Lors de ces sessions, je me renseignais sur tout ce qui concernait la carrière de cette personne. Mieux je connaissais l’autrice, plus je pouvais cibler ses besoins.

C’est comme ça qu’on parlait de son actualité, de ses sorties à venir. Une de ses publications imminentes était prévue dans une grosse structure. Je lui ai demandé de me parler de sa relation avec cette maison d’édition.

Quand elle a évoqué les conditions du contrat pour cette prochaine romance, je prenais des notes, comme d’habitude, quand je lui ai demandé de répéter. J’étais sûre de n’avoir pas bien compris.

Elle a donc redit ceci:

J’ai refusé les à-valoir, j’avais peur de ne pas pouvoir les rembourser.

En continuant la discussion, j’ai découvert plusieurs éléments qui m’ont rendue dingue.

1. Les autrices débutantes en édition traditionnelle pensent souvent que les à-valoir, aussi appelés “avance sur droits”, doivent être remboursés.
2. Cette maison d’édition s’est bien gardée de la détromper.
3. Ce milieu est vraiment pourri, sur certains aspects.

Parce que non: tu ne dois pas rembourser l’avance. Jamais. Dans aucun cas, sauf si tu ne respectes pas tes engagements prévus par le contrat.

Mais les ventes de ta romance n’ont aucun impact sur ça. Les à-valoir sont à toi, c’est définitif. Peu importe si tu vends 3 exemplaires de ton livre, ou 30 000.

Le principe de cette avance est de t’assurer un revenu minimum sur ton travail d’écriture. Car vendre le livre est le job de la maison d’édition. Si les ventes sont mauvaises, ce n’est pas la faute de l’autrice. Jamais.

Il faut davantage parler des conditions contractuelles de l’édition, car j’ai par la suite croisé d’autres autrices (et futures autrices) qui étaient impressionnées par les à-valoir. Elles avaient peur d’avoir la pression.

Certaines maisons d’édition sont assez honnêtes pour répondre la vérité. Mais celle avec qui l’autrice que je coachais avait signé n’a pas du tout rétabli la vérité. Ils voulaient la rémunérer 1000 euros (ce qui n’est déjà pas ouf, hein) et ont fini par lui verser 150 euros, car ils ne pouvaient légalement pas descendre à 0. C’était donc le minimum. Malins…

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Alors, comment fonctionnent les à-valoir?

 

En réalité, les à-valoir sont une assurance d’être payée pour l’autrice. Mais aussi que la maison d’édition se bouge un minimum les miches pour que la romance soit vendue. Car ils ont investi, entre autres avec les à-valoir, pour ce titre. Ils ont donc tout intérêt à obtenir un retour sur investissement à la hauteur.

Les à-valoir sont versés à l’autrice, en général en 1, 2 ou 3 fois.

Par exemple, si l’autrice est payée 3000 euros (ce qui est tout à fait correct et une base honnête), ça peut être répartie de cette façon:

1. Un versement de 1000 euros à la signature du contrat
2. Un versement de 1000 euros à la remise du manuscrit
3. Un versement de 1000 euros à la publication

Le plus souvent, c’est plutôt réparti comme ça:

1. Un versement de 1500 euros à la signature du contrat
2. Un versement de 1500 euros à la remise du manuscrit

Quoi qu’il arrive, garde bien en tête que cette somme est brute. Et que tu auras peut-être des impôts et des charges d’artiste-autrice à payer dessus, selon la somme totale de tes revenus annuels liés à l’écriture.

Dans l’article sur le Statut Hybride, j’ai détaillé la façon dont tu “remplis” ton avance. C’est-à-dire que tes premières ventes vont amortir ce que tu as reçu en à-valoir, et que tu commenceras à toucher des droits lorsque tes ventes auront comblé ton avance. Ce qui est logique: la maison d’édition t’a en quelque sorte fait crédit sur tes droits à venir.

Mais ça ne veut pas dire que si tu ne remplis pas l’avance avec tes ventes, tu dois la rembourser. Elle est acquise. Tu es tranquille à ce niveau.

C’est pour ça qu’il est important d’avoir des à-valoir: tu es rémunérée pour ton écriture. Et même si la maison d’édition n’assure pas sur le marketing, ou si leur choix de couverture plombe les ventes, ou tout un tas d’autres raisons qui expliquent pourquoi un titre fait un flop… tu as été payée.

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Moyenne des à-valoir en romance

 

Parfois, on ne va pas se mentir, c’est du gros foutage de gueule.

Quand une maison d’édition de romance te proposer 150 euros bruts pour un titre, soi-disant parce qu’il ne va sortir qu’en numérique, j’ai envie de dire: pardon?

Parce que les frais étant moindres sur la publication numérique (il n’y a aucune prise de risque d’impression du livre), mais les possibilités de vente pourtant tout aussi élevées (surtout en romance où le lectorat joue clairement sur les 2 formats), c’est tout de même vaseux comme explication.

Et pourtant, de très grosses structures en sont encore à proposer des cacahuètes à des autrices. Et les autrices, comme je l’ai été, contentes d’être signées, ne réfléchissent pas à deux fois avant d’accepter. Toutes autant que nous sommes, en continuant de tolérer d’être traitées de cette manière, nous participons à l’entretien d’une pratique scandaleuse.

Ceci étant dit, j’aurais du mal à donner une moyenne des à-valoir en romance, car ça varie énormément.

Je peux en revanche te dire combien j’ai touchés d’à-valoir au fil de ma carrière.

0 euro. Eh oui, j’ai accepté de signer pour rien du tout. C’est une pratique que j’ai depuis éradiquée, mais au début, j’ai fait partie des autrices tellement reconnaissantes d’être publiée, que j’aurais sûrement payé pour l’être… passons.

150 euros: je viens d’évoquer les conditions. Sans commentaires.

300 euros: c’était pour une nouvelle en numérique. On va dire que vu le contexte, le montant si bas s’expliquait.

1000 euros: c’était pour de la non-fiction, mais je le mentionne ici car je sais, autour de moi, que ça se pratique aussi en romance.

2000 euros: pour une réédition, dans des conditions très avantageuses pour moi (d’où l’entorse à ma règle dont je te parle de suite)

3000: pour des rééditions. C’est devenu ma base de référence. Aujourd’hui, si je devais encore signer avec une maison d’édition de romance, je n’accepterai pas moins. Car cette sommes m’assure un revenu minimum, certes, mais aussi que l’éditeur ne considère pas mon titre comme un simple numéro dans un catalogue.

5000: également pour une réédition. J’en parlerai dans un prochain article, mais j’ai fini par refuser cette offre.

10 000: cette fois, c’était pour une nouveauté. Mes plus gros à-valoir de romance à ce jour. Je sais que certaines autrices de romances ont touché jusqu’à 15 000 euros. Et je ne parle pas de celles qui sont publiées depuis un moment, ont fait leurs preuves, et touchent davantage. L’exception ne fait pas la règle.

Comme tu le vois, ça peut énormément varier. Et j’ai récemment accepté des conditions moindres dans d’autres circonstances, par conviction et parce que je voulais travailler avec telle ou telle maison d’édition.

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Les à-valoir: tu les vaux bien!

Comme je te le disais à l’instant, il est important de te fixer une limite en-dessous de laquelle tu refuses de descendre. Sauf exception, à ton avantage, tu dois garder à l’esprit que sans autrice, pas de romance.

La tienne ne vaut pas moins qu’une autre. Si une maison d’édition souhaite la signer, c’est qu’elle y voit son potentiel. Qu’on te propose ou pas d’y appliquer de nombreuses modifications n’entre pas en ligne de compte.

Pars du principe qu’on te traitera toujours comme tu autorises qu’on te traite.

À mes débuts, j’acceptais tout et n’importe quoi, parce que j’étais contente d’être publiée. Quand on m’a proposé mes premiers à-valoir à 3000 euros pour une réédition, j’ai sauté de joie. Pour moi, c’était incroyable!

Rétrospectivement, et en étant réaliste et me fiant aux ventes: je méritais cette somme! Ce n’est pas un cadeau qu’on m’a fait. Mon texte s’est vendu, et continue de se vendre, parce qu’il plaît. Alors oui, ces 3000 euros étaient un minimum.

Aujourd’hui, j’ai bien plus conscience de ma valeur. Et surtout, ma première option n’est pas de signer avec une maison d’édition. Je t’en parle d’ailleurs dans l’article consacré à l’autoédition quand on démarre. Publier mes histoires en indépendante n’est pas un second choix. C’est ce que je préfère.

Alors si j’ai une opportunité de travailler à nouveau avec un éditeur, je sais ce que je veux et ce que je ne veux pas.

Les à-valoir sont sur ma liste, sur les conditions que je suis prête à accepter. Moins de 3000 euros, c’est non. Si en face de moi, ça ne convient pas: aucun souci. On se serre la main et on se souhaite une bonne continuation.

Mais je dirai d’emblée que ma base de négociation est 3000, qu’il n’est pas nécessaire de me proposer moins, je refuserai. De cette façon, je nous fais gagner du temps, et j’annonce aussi que je connais la valeur de mes écrits.

Je ne dis pas que ta limite doit être 3000 euros. Il s’agit de la mienne, réfléchie d’après mon expérience. Elle me correspond pour plein de raisons. La tienne sera peut-être différentes, c’est à chacune de se la fixer. Mais ne te brade pas, tu mérites mieux.

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Comment négocier tes à-valoir?

 

Et si tu souhaites entamer une négociation avec la maison d’édition, ce n’est pas compliqué. Il faut simplement savoir quelles sont ses habitudes, et décider où tu te positionnes.

Pour ça, essaie de te renseigner parmi les autrice qui sont déjà signées. Toutes ne seront pas open pour évoquer cet aspect du métier. Malheureusement, en France, on n’aime pas parler d’argent. Encore moins quand c’est lié à une activité de l’esprit, comme l’écriture. C’est même presque un blasphème, pour certaines personnes.

Ce qui ne t’empêche pas de tenter, afin de t’assurer, pour commencer, que la proposition de la maison d’édition est dans les clous. On n’est pas à l’abri que leur première offre soit sous-évaluée, dans l’espoir que tu l’acceptes telle quelle.

S’il s’agit de ta première publication, tu dois encore faire tes preuves, donc tu n’auras pas beaucoup de marge de manœuvre. Mais dès que tu as des chiffres de ventes à avancer, ça peut te permettre d’augmenter tes à-valoir.

Les éditeurs possèdent bien entendu ces chiffres (pour les publication en édition traditionnelle, en tout cas), ils les étudient avant de te faire une proposition. Ça a été mon cas pour un contrat, où je n’ai pas du tout eu besoin de négocier, car j’avais en face de moi une éditrice honnête qui n’a pas cherché à baisser la valeur de ma production écrite. Elle savait ce que le titre en négociation pouvait rapporter, elle s’est assurée que je signe avec elle et pas avec une autre maison.

C’est aussi quelque chose que tu peux faire jouer. Si une autre maison d’édition est intéressée par ton texte, et qu’elle te fait une meilleure offre, tu peux faire jouer la concurrence. Car si toi, de ton côté, tu préférerais que ta romance soit publiée ailleurs, tu peux tout à fait dire “Un éditeur m’a proposé XXX euros pour ce texte, mais j’ai très envie de travailler avec vous. Qu’est-ce que vous pouvez me proposer?”

Et la discussion sera entamée sur cette base.

N’hésite pas à prendre le temps de toujours réfléchir avant d’accepter des à-valoir, de demander conseil autour de toi, à d’autres autrices, et à ne pas foncer parce que tu es tellement reconnaissante qu’une maison d’édition s’intéresse à toi.

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Pour conclure…

 

C’est dommage qu’on ne parle pas plus de cet aspect de la carrière des autrices de romances. Le tabou autour de l’argent et des revenus n’est pas sain, d’après moi. Comme si on était toutes en compétition, ou qu’on partait du principe que c’est de l’ordre de l’intime. À cause de ça, des autrices de romances débutantes signent tout et n’importe quoi, comme je l’ai fait.

Je n’aurais probablement pas demandé 3000 euros à la première maison avec qui j’ai signé: il s’agissait d’une toute petite structure familiale (je n’ai d’ailleurs jamais été aussi bien traitée par une éditrice qu’à cette époque). Mais ça m’aurait préparée pour la suite.

Je n’ai pas été mal lotie, loin de là. J’ai pourtant constaté à travers de nombreux exemples autour de moi que ce n’est pas rare de se faire avoir. Comme cet éditeur peu scrupuleux qui, dans sa grande bonté, a accepté de baisser sa proposition d’à-valoir de 1000 à 150 euros.

Rien ne vaut une bonne connaissance pour tout ce qui concerne ta carrière d’autrice de romances. Et ça commence par l’écriture. Car si tu es sûre de ton texte, alors tu peux prétendre à de meilleurs à-valoir!

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Romantique et rebelle à la fois, elle puise dans la vie les bases de ses histoires, puis y ajoute un coup de baguette magique pour faire voyager son lectorat !

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